La porte

Confortablement installés dans nos fauteuils, nous savons ce qu’il ignore. Il se tient debout hésitant. Il n’a pas idée du monde dans lequel il va être propulsé et les aventures qui l’attendent. Et nous, spectateurs, sommes impatients qu’il franchisse cette foutue porte.

La porte cet objet du quotidien ouvre sur l’inconnu, les interrogations, les joies et les peines. Sur bien des perspectives.
Que ce soit une porte fantastique des étoiles qu’il a enfin franchie, la porte cyclopéenne de R’Lyeh ou de toute autre nature.
Que ce soit dans l’histoire, les portes Saint Denis, de Mycènes, de Brandebourg entre autre, nous offrent le témoignage de ces gloires et espoirs passés.
Que ce soit dans la sculpture, avec « La porte des enfers » d’Auguste Rodin ou dans la littérature avec « La porte des enfers » de Laurent Gaudé.
Que ce soit dans la vie de tous les jours avec la porte latérale qu’on oublie ou celle à galandage qu’on retient mal, la porte de devant pour le vieux flic ou celle de derrière pour le jeune flic, la porte à battant ou celle à tambour.
Que ce soit enfin au cinéma où la porte y est sublimée.

Ah la porte dans le septième art !..

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Brandenburger Tor : Cette porte symbolise l’histoire européenne moderne.

Comme dans « Léon » de Luc Besson (1994) cette porte qui s’ouvre dans un jet de lumière sur Mathilda pour lui sauver la vie. Cette même porte qui se referme sur l’équipe d’intervention pour lui infliger la mort.

Pour continuer sur un ton mortifère, la porte angoissante de « L’ascenseur » de Dick Maas (1983) ne s’ouvre ou ne se referme jamais comme il faut, se transformant en outil assassin.
A l’inverse, et tout autant angoissant, certaines portes prennent de violents coups que ce soit de hache ou de couteau long comme ça, entre autre dans « The Shining » de Stanley Kubrick (1980) et « Halloween » de John Carpenter (1978). D’autres portes sont enfoncées, à coup d’épaule, de pied, de bélier, police ouvrez ! voire défoncées, explosées.

On ne présente plus la fameuse porte des « Tonton flingueurs », elle s’ouvre sur un « joyeux anniversaire » chantonné les dents serrées appuyé d’un bourre-pif pour se refermer sur une ritournelle.
Pour rester dans les temps de guerre : la porte que l’on souhaite peindre en noir, dans Paint it, black des Rolling stones (1966), générique de fin de « Full Metal Jacket » de Stanley Kubrick (1987). Ne pas la chantonner, elle restera en tête.

Moins guerrier et plus léger, la porte du train à laquelle le personnage s’accroche pour attraper un dernier baiser de sa bien-aimée, ou l’inverse. La reverra-t-il ? Le reverra-t-elle
Tout cela fait penser à « Casablanca » de Mickaël Curtiz (1942).

Plus cocace, la porte de la cathédrale franchie à cheval dans « The Princess Bride » de Bob Reiner (1987).
Tout aussi religieux, la porte du paradis à laquelle on frappe dans « Knockin on heaven’s door » de Thomas Jahn (1997), au titre inspiré de la chanson homonyme de Bob Dylan (1973). Ne pas la chantonner, elle restera en tête.

Des portes bien visibles donc, contrairement aux portes secrètes ou dissimulées, que l’on retrouve avec plaisir dans les films de gangsters ou d’agents secret. Les films sur la prohibition et les « James Bond » en sont friands.
La porte peut être visible mais à mécanisme discret, comme celle à l’énigmatique frontispice dans « Le nom de la rose », le palimpseste de Jean-Jacques Annaud (1986).

Enfin, si un film a mis à l’honneur les portes, c’est bien « Pulp Fiction » de Quentin Tarantino (1994).
Doit-on parler de porte quand il s’agit d’un coffre automobile qui s’ouvre sur Vincent et Jules ? Peu importe, des portes donc. L’une s’ouvre sur le jeune braqueur et l’autre sur l’acolyte hilare de Marcellus. La porte du magasin de Zed qui sert de refuge si j’ose dire. Toujours dans ce magasin, la porte de la cave qui s’ouvre sur Marcellus mastiquant une boule rouge si j’ose dire. Il est aussi question de cette porte anale franchit par la montre paternel, exploit raconté par le capitaine Koons. La porte de l’ascenseur qui s’ouvre sur une question de massage des pieds, et se referme sur une question de massage des pieds. La porte que Butch ouvre délicatement pour retrouver cette foutue montre sur le kangourou bordel. Enfin la porte des toilettes ouverte puis refermée par Vincent dans un bruit de châsse d’eau, puis ré-ouverte dans un bruit de mitraillage.

La porte des toilettes dans la vie de tous les jours c’est la porte que l’on fixe le plus. En particulier dans les lieux publics, on la fixe parce qu’elle ne s’ouvre jamais assez vite. Ou parce qu’elle ne se ferme pas du tout.
Accroupie elle pense à tout ça en chantonnant des airs qui restent dans la tête, parce que forcément c’est bien sa veine, celle-là ne se ferme pas.

Note : En écrivant ce billet je ne pensais pas rester autant sur le cinéma. C’est involontairement que je produis ici un plagiat du Blow up (Arte) « La porte au cinéma » que je vous recommande chaudement : https://youtu.be/XNyBQfh2oBE

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